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Afghanistan photo prise par mon fils en mission
Ne pars pas
Ne pars pas mon fils !
Rentre à la maison
Je t'en supplie , ne pars pas !
Là-bas, il y a des fous, sans foi ni loi.
Songe à ta mère qui serait orpheline,
Mon petit, mon tout-petit !
Enlève cet uniforme grotesque
Je t'assure, le costume te va beaucoup mieux.
J'ai bien voulu panser tes écorchures aux genoux
J'ai bien voulu badigeonner tes bosses et rafraîchir tes bleus,
Mais maintenant, tu es trop grand pour jouer à la guerre.
C'est moi qui te le dis, laisse ces sales joujoux
Je me fous des médailles, je me fous des discours
Si jamais tu reviens, le béret en berne
Tu t'en foutras aussi de la sonnerie aux morts
Ne pars pas mon petit
Je ne t'ai pas tout dit
Je ne me rends jamais au monument aux morts***
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Arrêts sur images
Pensées fugitives zébrant le fil de l'air
Qu'en vain la main voudrait s'en saisir.
A peine entrevues, elles s'enfuient déjàEphémères instants
Dans l'épaisseur du temps
Nécessités dérisoires
Ou rêves illusoiresEnvol d'une escouade de vanneaux
Epi courbant sous le fléau
Ondes insaisissables
Des souvenirs impalpables
Neiges fondantes sous le geyser sulfureux
Des songes-creuxQuelques notes traversières
Humides sous les paupières
Un parfum volatil
Qui fuse et se faufile
Une larme fugace
Qui roule dans l'impasse
Clameurs qui s'évanouissent
A l'ombre des prémicesMais, Ô tendre merveille
Ö nature enchantée
La fleur rit au soleil
Sous les doigts dégantés***
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Pourtant, il fait beau
Sur l’asphalte s’envolent
Un livre de poèmes
Des clichés d’amoureuxSur l’asphalte s’étiolent
Les rires d’un été
Les rêves de mariéeSur l’asphalte s’endorment
Les yeux couleur du ciel
Et les mains sur le cœurSur l’asphalte se collent
Une liqueur vermeille
Quelques mèches boucléesSur l’asphalte convolent
Des véhicules rouges
Et des hommes en blancSur l’asphalte…Une auréole
***
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Pissarro. Soleil couchant
Soir d'été
Vient le soir odorant. Assis sous le tilleul
Aux grappes si blondes lourdement parfumées,
Il aime à contempler, sur la plaine, les meules
Et l’astre rougissant les têtes d’or des blés.La brume de l’été, lentement s’alanguit,
Laitance d’argent sous la brise légère.
Les troupeaux fatigués se font une litière
Et l’âne, au pré, s’endort. La terre s’engourdit.A peine si le vent fait frissonner les bois.
L’écho qui lui parvient des nocturnes rainettes
Attise le sommeil et son âme chatoie
Sur les simples accords d’une frivole ariette.Un rossignol tardif s’appuie sur le tilleul,
Voit le vieil homme assis qui, doucement, somnole,
Gringotte de son mieux, chante une barcarolle,
Déployant, pour sa nuit, le plus blanc des linceuls.***
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Jacob Isaacks van Ruisdel ; peinture hollandaise. musée national de Tokyo
Ombre
Un arbre, à demi-mort, sous le lierre frissonne,
Offre sa tête chauve et secoue ses bras nus
Boit les derniers rayons qui ne nourrissent plus
Ses veines tant trouées, son corps creux qui résonne
Comme un tambour-chagrin quand les boeufs s'y encornent.
Il écorce ses ans , craque sous l’ ouragan
Les jeunes chênes-verts ne craignent pas la viorne,
Etalent, insolents, leur bruissant habillage,
Happent tout l'or du soir et rient jusqu'aux hameaux.Riez tant qu'il est temps, ne dure le ramage.
Il faut vous étourdir avec les étourneaux.
Quelques saisons encor pour plaire aux jouvenceaux
Et votre ombre pliera sous la coupe du temps.
Le tendre lit moussu sèchera sur vos pieds;
Vos membres craqueront sous le mal lanscinant
Et d'ombre n'aurez plus à offrir aux troupeaux
Quand ils s'en vont, le soir, chercher les frais ruisseaux.
Sur vos rameaux noircis se figera la buse,
Sentinelle drapée de lumière diffuse.***
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Toulouse -Lautrec : Le salon de la rue des Moulins
- Ma mère voulait pas être bonniche
J’invite mes chagrins à se donner la main
A rechercher l’enfance en papier quadrillé.
Allez ! Sonnez l’arrière-ban des misères d’antan !
Même si l’on ne revit jamais rien et que l’on rafistole,
La vie rentre d’abord par les odeurs.
On a des parfums calés dans la mémoire,
Ceux des œillets mirlitons de chez la Madame Rose
Jusqu’à ceux des chrysanthèmes sur la tombe du p’tit frère
L’odeur du grésil dans la niche du chien
Et celle des médocs du papy résistant.J’invite mes chagrins à se donner la main.
Même si j'étais le gosse qu'on n'attendait pas,
Qu’on cachait dans la luzerne de la Creuse,
J’avais pour mère une dame parfumée
Qui m'envoyait des cartes postales de Paname
Où un jour je la rejoindrai
Elle me visitait après les Noëls dans la ferme
Où je dormais avec d’autres mioches surnuméraires
Dans des p’tits lits en fer.J'invite mes chagrins à se donner la main
Quand la blanche torpédo longe le clapier
Faisant crisser les roues et meugler dans l'étable,
Riri le parigot en trois pièces et manchettes
Suçant son havane en comptant la recette
Ma belle dame de mère chapeautée de bibis
Et les jambes luisantes de bas nylon
Laissait des traces de son parfum dans l’escalier
Puis s’en allait poursuivant son chemin bordé d’hommes.J’invite mes chagrins à se donner la main.
Un jour j’ai quitté ma dépouille d’enfant
Pour devenir parisien chez les dames modistes
Avec Loulou, Mimi, Cathou dans leur salon mignon
Au fond d’une courette fleurie
Où venaient des messieurs graves aux boutons en légions
Qui faisaient dormir les bonniches dans des mansardes glacées
Les rescapés de la Première aux érections fléchissantes.
Et puis… Et puis… La Deuxième guerre est arrivée !
Mais … Ne Parlons pas de ça, on ne peut pas passer sa vie
A se mettre la rate au court-bouillon pour les malheurs du passé .
(Hommage à Alphonse Boudard)
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Tristan et Isolde, La mort des amants , peinture de Rogelio de Egusquizo
La voile blanche
Ah ! Que vienne l’aurore, s’éloigne le trépas !
Je souffre Chère Femme et n’y survivrai pas,
Si noire est cette plaie qui me mange le corps.
Ne m’abandonne pas ! Aie pitié de mon sort,
Iseult ! Viens sans tarder, sans toi ne puis périr !
Viens me baiser la bouche avant que de mourir !Las, le vent s’est levé, la mer frappe sa voile.
Sa nef cingle à grand peine aux voûtes sans étoiles.
Mène-moi au rivage, exauce un dernier vœu
Que je caresse encor l’or fin de ses cheveux.
Dans les flots me noierai si je ne la vois pas
Et de draps de velours le ciel nous couvrira.Pourquoi tant de fureur écume sur les flots ?
Yseult, mon adorée, tiens bon sur le vaisseau !
Est-ce toi que je vois au mât de voile blanche
Qui tangue frêlement sur la mer qui déhanche ?
Ah ! Je ne vois plus rien, aveuglé de douleurs,
J’expire sur la grève… Mon amour, je me meurs…L’anneau de jaspe vert ainsi que mon épée,
Je les veux dans ma tombe et toi à mon côté,
Nos deux corps enlacés d’un brin de chèvrefeuille
Et sur le coudrier chantera le bouvreuil,
Les ronces jailliront autour de nos linceuls
Et comme doigts scellés, jamais ne serons seuls.D’après la légende de Tristan et Iseult
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peinture F.Aubry de Montdidier
La Madone
Peut-être la surprendrez-vous
Cachée sous une dune blonde
Portant un enfant à son cou ?
Vous penserez qu’elle est féconde
Drapée dans sa robe safran
Aux pans légers s’ébouriffant.
Elle enfle au vent chaud du désert
Ses flancs arrondis de promesse.
Vous la verrez, la femme fière,
Prendre à l’argile sa noblesse.
Peut-être la surprendrez-vous,
La Madone, debout.
Là-bas, dans les palétuviers
Des feux de roquettes déchirent
Le bleu du ciel noir de mortier.
Ses frères, son père, s’en vont rougir
Les eaux du fleuve dont la reine
Plus ne veille sur ses enfants.
Comme l’ébène qu’on enchaîne
Vont s’engloutir les talismans
Et les flamants en désarroi
Fuient la Mangrove qui les cloue.
Au loin, vous la verrez parfois,
La Madone, à genoux.
Son ventre crie la délivrance.
Ô sombres yeux dont la détresse
Aura raison de sa vaillance.
La vie, la mort, tous deux oppressent.
Dans cet enfer, un sang nouveau
Perdrait trop tôt son innocence,
Rejoindrait vite le tombeau.
Elle s’étend. Sans résistance,
Au soleil offre ses entrailles
Tandis que gronde la mitraille.
Vous l’entendrez, agonisante,
La Madone : elle enfante.
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peinture auteur inconnu
Les moissons
Réveillez-vous ! Ne voyez-vous poindre l’aurore ?
Le temps nous presse avant que le jour décolore !
La brume se répand au bas de la vallée ;
Les épis frissonnants tardent d’être coupés ;
Bateleurs aux pas lourds vous arpentez la plaine
Blonde qui se répand en mère souveraine.
La machine mugit, crache la poussière
Collant à la sueur sur les fronts et les torses.
Et l'on combat le temps et l'on use ses forces .
Déjà les grains dorés roulent dans l’entonnoir.
Le soleil au midi s’efface et s’amoncelle
Une nue menaçante or que le ciel est noir.
C’est une course folle afin que l’on bottelle.
On prie pour que l’ouvrage achève avant la pluie,
On redouble d’ardeur, on chante et l’on s’écrie.
Au soir, las et fourbus, la récolte engrangée,
On se retrouve autour d’une bonne tablée.
D’un sourire vainqueur on se serre la paume;
La plaine dormira dans son grand lit de chaume
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Nature morte
L’étang, comme lame de platine,
Accablé de pesante chaleur
Somnole
Nimbé de brume blanche.
C’est l’heure où les faucheux
A grandes enjambées
Marchent sur l’eau,
Frôlent leurs ventres arrondis,
Zigzaguent entre les serpents
Qui ondulent
Et le bondissement des grenouilles
Sur le trèfle cornu.
Les sauterelles jouent à piqueter des mues
Mordorées
Sous l’œil indifférent des bœufs débonnaires
Qui sortent de l’ombre des sureaux,
S’envasent joyeusement
Et fouettent des gerbes d’eau scintillante.
Le ciel se pare de traînées oranges
Et l’envol d’un col-vert échappé des iris
Fait trembler les pétales engorgés de soleil
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